Smart Grids : L’intelligence au service de la transition énergétique

Les smart grids ne cessent d’étendre leurs ramifications pour répondre aux défis de la transition énergétique. Compteurs intelligents, mutualisation des réseaux électriques européens, recours aux drones pour leur maintenance… l’intelligence devrait, dans les prochaines années, s’insinuer à toutes les échelles des réseaux d’électricité. Chronique d’une révolution annoncée.

 

Transformer les particuliers en véritables acteurs de leur consommation : tel est l’un des principaux enjeux des smart grids, ces réseaux « intelligents » qui tissent leur toile pour accompagner la transition énergétique. Grâce aux compteurs intelligents et autres équipements connectés, chacun pourra choisir l’heure à laquelle il lancera son four, son chauffe-eau ou son lave-linge. Le tout, en bénéficiant d’une modulation de prix bien plus fine que l’actuelle tarification heures creuses / heures pleines ! Les habitants des maisons à énergie positive, quant à eux, auront le choix entre vendre leur surplus de courant sur le réseau général, l’échanger avec leurs voisins, ou le stocker dans des batteries, situées à domicile ou dans le quartier. Cette gestion intelligente de l’énergie à l’échelle de l’habitat sera déclinée à l’échelon supérieur, celui des immeubles, des quartiers et des villes, qui pourront de la même façon piloter l’éclairage public, le chauffage des équipements collectifs ou la recharge des parcs de véhicules électriques.

 

Un outil pour équilibrer les sources d’énergie

Au niveau national, les smart grids contribueront à garantir le mix énergétique le plus décarboné possible, au meilleur coût. L’intelligence sera indispensable pour combiner en temps réel des énergies à forte inertie, comme le nucléaire, avec des énergies vertes soumises aux caprices de la météo, telles que l’éolien ou le photovoltaïque. En parallèle, de nouvelles règles du jeu seront sans doute nécessaires. L’enjeu : faire en sorte que toutes les parties prenantes – producteurs d’énergies, collectivités locales, entreprises – jouent la même partition. Un défi qui prendra tout son sens au moment d’affronter certaines phases délicates : pics de consommation énergétique hivernaux par exemple, ou coup de vent déclenchant une soudaine hausse de la production éolienne. Certains producteurs pourront alors être invités à modérer leur production, et des usines à limiter leur consommation.

 

L’Europe à l’heure du smart grid

La « smartification » se jouera aussi à l’échelle de l’Europe. De la Suède à l’Espagne en passant par l’Allemagne ou la France, les réseaux nationaux sont déjà largement interconnectés. « La Commission européenne souhaite aller plus loin, jusqu’à une forme de mutualisation, estimant qu’elle favoriserait une optimisation globale », indique Michel Béna, directeur adjoint de la R&D de RTE. De fait, plus le réseau est étendu, plus il devient facile d’équilibrer production et consommation grâce aux points forts de chacun : l’énergie hydraulique excédentaire de la Norvège, la sécurité de production du nucléaire français, l’abondant éolien espagnol…

 

Bientôt 30 millions de véhicules électriques

Dans le même temps, le réseau électrique devra s’adapter à l’essor du véhicule électrique. Pour l’instant limitée à 1 % du parc automobile français[1], un niveau largement supportable par le réseau, la voiture électrique va voir ses ventes exploser dans les années à venir. L’Union européenne a fixé à 30 millions le nombre de véhicules à l’horizon 2030 ! Cette montée en puissance pourrait se traduire par une forte augmentation des charges diurnes, aux heures pleines, sur des bornes à haute puissance, les utilisateurs souhaitant « faire le plein » le plus rapidement possible. De quoi « stresser » le réseau. Là encore, la solution passe par des systèmes intelligents, capables de piloter la charge en tenant compte des contraintes du réseau et des attentes des automobilistes, en termes de coûts et de délais. Il est aussi envisagé que les batteries des véhicules électriques puissent, en cas de pic de consommation, être mises à contribution. Avec pour fonction première de stocker l’électricité, elles pourraient, ponctuellement, alimenter le réseau, le temps d’équilibrer l’offre et la demande.

 

Une maintenance par drones

Un autre acteur pourrait entrer en scène : le drone. Déjà utilisé pour faciliter le repérage de dysfonctionnements sur le réseau aérien, le drone pourrait voir son usage se banaliser sur les smart grids du futur. Des expérimentations sont en cours pour que les images qu’ils collectent soient analysées par des dispositifs d’intelligence artificielle. « Visionner des centaines de photos pendant des heures à la recherche d’un câble abîmé ou d’un pylône endommagé peut s’avérer assez vite rébarbatif pour des opérateurs humains, confie Yves Barlier, directeur des smart grids chez Enedis. Nous expérimentons des applications capables de les détecter automatiquement. Les premiers résultats sont encourageants mais nous attendrons que la fiabilité dépasse 80 % pour les rendre opérationnels. » Grâce à cet entretien méticuleux, le smart grid pourra pleinement répondre aux objectifs de la transition énergétique.

 

 

 

[1] https://www.tf1info.fr/environnement-ecologie/le-parc-automobile-francais-compte-t-il-aujourd-hui-1-de-vehicules-electriques-comme-l-affirme-jean-baptiste-djebbari-2199327.html