Les objectifs et la réalisation de la stratégie 20/20/20

L’année 2020 est la première date charnière que s’est fixée l’UE pour la réalisation du plan climat décliné dans la stratégie dite « 3×20 ». Entre 2008 et 2009, l’UE à 27 a établi un paquet législatif pour atteindre ses objectifs. En vue de la COP 21, un nouveau paquet énergie-climat est aujourd’hui en négociation. Il apparaît donc opportun de faire le bilan du 1e plan énergie climat et d’envisager les perspectives.

Que contient le paquet énergie-climat de 2008 ?

Le paquet législatif est composé de trois directives[i] et une décision[ii], complétées par deux règlements[iii]. Ces textes définissent les objectifs et moyens mis en œuvre pour réussir la stratégie 20-20-20 d’ici 2020. Celle-ci consiste en une réduction de 20% des émissions de gaz à effet de serre en se basant sur les niveaux de 1990 : + 20% d’efficacité énergétique, + 20% d’énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie et une augmentation de 10% de la part d’énergies renouvelables dans les transports.

Sur ce dernier point, la directive 2009/30/CE fixe comme seul objectif contraignant la réduction de 6% d’émissions de GES dans les transports, en se basant sur les taux de 2010. Le règlement n°443/2009 impose aux constructeurs automobiles de faire passer les émissions de C02 de leurs véhicules à 130g/CO2/km d’ici 2015 et à 95g/CO2/km en 2020. En cas de non-respect des quotas, des sanctions peuvent être engagées.

La directive 2009/28/CE fixe la part d’énergies renouvelables dans la consommation finale par pays. Ainsi, l’objectif de la France est aujourd’hui de 23%, il était de 11,4% en 2008. Chaque Etat doit établir un plan d’action établissant les taux à atteindre dans la consommation d’énergie produite à partir d’énergie verte. La directive prévoit que les biocarburants et les bios liquides participent à la réduction de 50% d’émissions de GES d’ici à 2017.

Un bilan contrasté

Selon l’Agence Européenne pour l’Environnement (AEE) l’UE serait en bonne voie pour atteindre ses objectifs. Si elle continue au rythme de 2012-2013 de 2% de réduction des émissions de GES, l’UE atteindra en 2020 une diminution totale de 21 % d’émissions de GES par rapport au niveau de 1990.
La part des énergies renouvelables dans la consommation finale était de 14% en 2012, ce qui est de bon augure pour la réalisation de l’objectif. Cependant il faudrait que la part des énergies vertes augmente de 6% par an pour que l’objectif soit réalisé. En France, il faudrait ajouter 1500 MW d’éolien par an pour réussir, contre 1000 MW actuellement.

En 2011, J-M Barroso avouait que l’objectif +20 % d’efficacité énergétique ne serait pas tenu, les économies d’énergies étant trop lentes : l’UE n’améliorerait que de 10% son efficacité énergétique. Cet échec s’explique notamment par le manque de mesures contraignantes pour les Etats Membres, les plans nationaux n’étant pas contrôlables par l’UE.

La crise économique sert aussi d’argument pour expliquer ce résultat contrasté. Cependant, la Grèce, fortement touchée par la crise serait en passe d’atteindre les objectifs. La France, comme l’Allemagne, n’arrivera pas à atteindre les +20% en matière d’efficacité énergétique. Malgré cette réussite en demi-teinte, l’UE s’est engagée en octobre 2014 sur des objectifs plus élevés.

Les accords de 2014 : dépasser la stratégie 20 20 20

La directive 2012/27/UE de 2012 cherche à encourager la réalisation du +20% d’efficacité énergétique. Celle-ci fixe un cadre plus contraignant, avec un objectif de réduction obligatoire de 1,5% par an de ventes d’énergies, hors transports. Autre objectif, une rénovation de 3% des bâtiments de l’Etat par an. Cette directive constitue une transition vers le nouveau paquet Energie-Climat, plus strict. Selon les représentants des Etats Membres cet accord ambitieux est réalisable. Cependant les associations de défense de l’environnement dénoncent un accord “minimal”.

Le 24 octobre 2014, le Conseil Européen s’est donc fixé de nouveaux buts à atteindre pour 2030. En se basant sur les taux de 1990, la part des énergies renouvelables dans la consommation finale devra être portée à 27 %, les émissions de gaz à effet de serre devront diminuer de 40 %, et 27 % d’économie d’énergie devront être réalisés. Le second objectif est critiqué pour son manque d’ambition, car il ne permettra pas de diviser par 4 les émissions d’ici 2050, comme cela serait nécessaire pour limiter la hausse de la température de la Terre à 2 degrés.

Mais les Etats Membres font face à des enjeux différents. Le Premier Ministre britannique D. Cameron, sous la pression des eurosceptiques, a essayé de limiter le poids de l’UE dans la politique énergétique des Etats membres. Certains objectifs ont donc été revus à la baisse durant la négociation : l’efficacité énergétique ne sera pas de 30 %, taux initialement prévu, mais de 27 %. Le groupe de Visegrád[iv] a obtenu, lui, des quotas d’émissions gratuits pour ses centrales à charbon jusqu’en 2030. En contrepartie, les pays au PIB plus élevé comme la France ou l’Allemagne ne pourront vendre que 90% de leurs émissions. Les pays de l’Est ont aussi négocié une clause qui leur donne la possibilité de revoir les objectifs.

Ainsi, les pays membres de l’UE sont les seuls à s’être engagés sur des données chiffrées et mesurables en vue de la COP 21. Cependant on peut s’interroger sur la réalisation de ce second paquet énergie climat alors que certains objectifs du plan de 2009 restent à atteindre.

 

[i] Une directive de l’UE doit être transposée par les Etats Membres suivant leur propre législation et fonctionnement.
[ii] Une décision est nominative, s’applique directement aux personnes identifiées.
[iii] Un règlement est directement applicable
[iv] Le Groupe de Visegrád est composé de la Hongrie, la Pologne, la République Tchèque et la Slovaquie.